LA VIE MODERNE

En quête d'une vie normale...

Le film commence en nous montrant dans un plan fixe, une chambre vide. Le plan stagne un peu, mais bientôt on voit une petite main qui s'extirpe de dessous le lit, puis c'est un corps tout entier. Nous venons de découvrir Marguerite, adolescente en quête d'elle même et d'une vie normale. On nous présentera ainsi à tour de rôle, Claire, la petite bourgeoise qui ne sait plus très bien où elle en est, et enfin Jacques, le divorcé "pas-de-bol".

Trois personnages atypiques en quête d'une vie normale, ou plus exactement en rupture avec celle-ci, mais sans réelle prise de conscience. Laurence Ferreira Barbosa continue à nous exposer sa vision de la vie des gens dans son dernier film : la Vie Moderne. Ce qui est intéressant, c'est la continuité qui s'instaure entre les films de cette cinéaste, non pas dans la narrativité mais dans les personnages, en particulier dans leur personnalité et leur psychologie. Les trois compères de cette histoire se rapprochent par leur légère et innocente folie à la Martine (Valeria Bruni-Tedeschi) du film Les gens normaux n'ont rien d'exceptionnel. De la même façon, ils ressemblent à Annie (Jeanne Balibar) dans J'ai horreur de l'amour. Naturels, naïfs, et pressés par la vie.

Laurence Ferreira Barbosa aime à travailler la psychologie de ses personnages : elle nous montre des gens normaux, comme vous, comme moi, que la vie a soumis à une épreuve. Justement, leur rôle est de résoudre cette épreuve, Marguerite devra s'affronter elle-même pour savoir pourquoi elle déteste ainsi tout le monde, elle devra s'affronter pour apprendre à s'aimer, elle qui demande à Dieu : "… éloignez les hommes mauvais de mon corps dodu…", et elle devra se battre contre son père pour faire lever la froideur quasi-autoritaire qui règne dans le foyer familial. Claire devra se battre contre elle-même pour sauver son couple, pour avoir l'enfant dont le manque est, selon elle, la source de ses problèmes. Jacques devra lui aussi se battre pour revoir sa fille, pour essayer de comprendre ce qui lui arrive depuis qu'il a rencontré Eva. Et dire que Laurence Ferreira Barbosa voulait tous les faire mourir dans un attentat à la fin du film. Fort heureusement, elle a changé d'avis !

Le point fort de cette vision de la vie que nous renvoit la cinéaste, c'est que nous sommes obligatoirement amenés à relativiser nos propres problèmes personnels. Car les trois personnages sont soumis à des problèmes que tous le monde peut rencontrer un jour : divorce, impossibilité d'avoir un enfant, mal à s'accepter soi-même, envie d'adultère, méfiance envers les autres, alcool, etc… Mais la manière dont ces personnes sont submergés, écrasés par ces problèmes et dont cela leur perturbe la vie, permet de nous rassurer nous-mêmes. Si l'on procéde par association, il est facile de se dire que nous sommes tous pareils, que nos problèmes ne sont pas exceptionnels car malgré tout, nous sommes tous des gens normaux !

Simon Chancerel

 

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