LE TEMPS RETROUVE / LA MALADIE DE SACHS / LA LETTRE

ADAPTATIONS

Le cinéma français ne serait pas un cinéma de genre : la science-fiction, la comédie musicale, le western, le polar (?!) lui seraient étrangers aux deux sens du terme . Et d'ailleurs la France revendique une identité culturelle… qui prend souvent la forme d'une adaptation littéraire. Alors l'adaptation serait le genre du cinéma français qui, sans lui être propre, en serait représentatif. Bien sûr, il ne s'agit souvent que d'une succession linéaire de scènes présentant les faits et gestes des personnages ; la critique attaque alors de presque systématiquement : " infidélité ! " mais aussi " plate infidélité ! ". Pourtant certaines adaptations (fidèles ou infidèles) forcent parfois le respect, soit parce qu'elles reposent sur un pari, soit parce qu'elles établissent un dialogue avec l'œuvre.

Les premières, ce sont par exemple Le Temps retrouvé de Ruiz ou La Maladie de Sachs de Deville. Chez Ruiz, les scènes s'enchaînent par association d'idée, le temps étant soumis à l'ordre du souvenir (du narrateur-Marcel Proust). Chez Deville les séquences de consultation résument une matinée en quelques minutes (champ sur le médecin/ contre-champ sur le patient/ champ sur le médecin/ contre-champ sur un autre patient). Les deux réalisateurs semblent adapter pour libérer la narration de la contrainte temporelle (de la scène et de l'ellipse).

Le projet de Oliveira est différent. Dans La Lettre, La Princesse de Clèves est transposé au XX° siècle et c'est son actualité qui est ainsi interrogée. Cependant, l'héroïne, enfermée dans un monde de convention où l'on parle encore le langage précieux du XVII° siècle, semble décalée par rapport au monde… et donc par rapport à nous, spectateur ; Oliveira donnerait donc à voir (sans doute malgré lui) le roman de Mme de La Fayette comme périmé. Mais alors pourquoi l'adapter ? Malgré sa rigueur, le film reposerait sur cette incohérence majeure.

DAVID LAGAIN

 

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